16
44.
Henri MATISSE
. L.A.S., Nice 24 avril 1942, à Henry de
M
ontherlant
à Paris
; carte postale avec adresses de l’expéditeur
et du destinataire au dos.
400/500
« Très heureux des bonnes nouvelles que vous me donnez de votre santé & de votre travail. Mon hiver a été assez bon. Ma santé n’a
pas eu de gros accros et j’ai beaucoup travaillé. Trop, car je suis en ce moment en dépression. Je ne puis jamais me reposer à temps. Selon
ce que vous m’avez écrit, je vous ai attendu tout l’hiver. J’espère avoir bientôt le grand plaisir de vous voir, quoique vous êtes dans votre
carte moins affirmatif au sujet de votre voyage en juin que vous l’avez été cet hiver. On travaille très bien partout, n’est-ce pas, parce
que les gens ont besoin de diversions qu’ils nous laissent en paix ? »…
45.
Henri MATISSE
. L.A.S. (« HM » et « H. Matisse » au dos), Nice 30 octobre 1942, à Henry de
M
ontherlant
à Paris
; carte
postale avec adresses de l’expéditeur et du destinataire au dos.
400/500
A
u
sujet de
S
ur
les
femmes
de
M
ontherlant
,
avec
3
dessins de
M
atisse
(Éditions du Sagittaire, 1942). « Tout est donc parfait. Tout ce
que dit votre Pierre-Quint est juste et vrai. Mais tout de même faites revenir en vos mains le meilleur dessin que j’ai fait de vous, et que
je voudrais voir en sûreté. Si P.Q. est toujours directeur du Sagittaire il se peut qu’il soit le malheureux compositeur de la couverture.
J’en ai écrit à Marseille un bon coup, qui m’a un peu soulagé. Ont-ils donc besoin d’égratigner l’œil du passant pour faire remarquer
leurs livres ? Mais le passant est si peu sensible. C’est l’artiste qui n’est pas à la page »…
46.
Henri MATISSE
. L.A.S. (« HM » et « Henri Matisse » au dos), Nice 15 février 1943, à Henry de
M
ontherlant
à Paris
;
carte postale avec adresses de l’expéditeur et du destinataire au dos.
400/500
S
ur
C
harles
d
’O
rléans
[Matisse travaille alors aux lithographies des
Poèmes de Charles d’Orléans
, que Tériade éditera en 1950].
« Votre façon d’exprimer votre opinion sur les Ballades de Ch. d’Or. m’a rempli d’aise et j’en ai ri à nombril déboutonné ! Je comprends
ceux qui aussi trouvent cu-cu, si vous voulez bien, les peintres ou sculpteurs primitifs. Moi je suis convaincu que la Renaissance est
la décadence. Comme Phidias. Et je me félicite de pouvoir tout en goûtant particulièrement l’atmosphère de cristal et musicale de Ch.
d’O., tant estimer votre
Reine morte
que j’ai encore relue en partie cette nuit. Je souhaite que nous puissions tout nous dire sans crainte
de vexation. Nous ne sommes pas à la Cour ! Et nous nous estimons »…
47.
Henri MATISSE
. L.A.S., [Nice fin 1943], à un ami [Henry de
M
ontherlant
]
; 6 pages in-4 (petite fente marginale réparée
au scotch).
1 500/2 000
L
ongue
et
importante
lettre
sur
leur
édition
de
P
asiphaé
. C
hant
de
M
inos
(Martin Fabiani, 1944),
et
où
le
peintre
médite
sur
la
fin
de
sa
vie
. [Le poème dramatique de
Pasiphaé
, publié en 1936 à Tunis, aux Éditions Mirages, fut représenté pour la première fois
le 6 décembre 1938 au Théâtre Pigalle, dans une mise en scène de Sylvain Itkine, scénographie de Charles Wolff et Georges Vakalo.]
« Nous supprimerons la page “Le poëme… a paru etc. … avec la distribution”. Cependant dans la préface-conférence vous faites
allusion à cette représentation d’une façon assez marquée : M
mes
M
rs
le
poème dramatique qu’on va représenter devant vous… J’ai trouvé certes
très heureux que l’auteur des décors et des costumes M
r
Wolff, vous
montrât… C’est pourquoi lorsque Sylvain Itkine me dit qu’il jouerait le
chœur en habit de soirée… Il me semble qu’il faut modifier la préface et
ce serait vraiment dommage, ou bien indiquer la première représentation
de cette pièce »… Matisse propose une formulation succincte, ainsi que
d’autres modifications touchant aux premières pages du livre...
« En réponse à votre souvenir fidèle de 1937, au sujet de la conclusion
d’une œuvre, je vous dirai, en vous remerciant d’avoir gardé ce souvenir,
que je suis en train de conclure. J’ai fait la conclusion l’an dernier pour
le dessin – comme moyen complet d’expression – et j’y suis engagé en ce
moment pour la Peinture. Je pourrai ainsi partir satisfait pour ce Grand
Voyage si commode, car il n’y faut aucun bagage, et tout y est multiplié.
Cet heureuse période de ma vie est advenu après ma sévère opération
chirurgicale d’il y a 2 années et sa longue et périlleuse convalescence
(2 ambolies, dont la dernière 60 jours après l’opération). Ayant eu
conscience que tout avait été presque perdu – puisque les bonnes sœurs
m’appelaient ensuite “le ressuscité”, je me suis trouvé comme rassasié
de l’intarrissable curiosité qui m’a affolé toute la vie, et j’ai dominé
mon affaire et moi-même. Mon éblouissement de la nature radieuse
qui m’empêchait de distinguer un objet distinct de l’ensemble de ma
contemplation a cessé et j’ai pu pénétrer à l’intérieur des choses. Je fais
partie de la grande fête. Je me vois, avant ma grande transformation, mon
appaisement plutôt – comme ces petits gosses au Luxembourg qui veulent
enfiler sur une fiche des anneaux pendant qu’ils tournent avec leur gentil
manège de chevaux de bois. Ils ne peuvent cependant y arriver, car leur
attention captivée irrésistiblement par le paysage qui les entoure »…