TAJAN - Paris. LIVRES et MANUSCRITS - ESTAMPES

TAJAN -26 Le sixième et dernier livre est l’atlas proprement dit, également dessiné par Dudley. Il contient 131 superbes cartes générales des mers du monde entier, d’une grande précision et ornées de titres calligraphiés selon un style artistique baroque unique. L’ensemble comprend 58 cartes pour l’Europe, dont 2 pour le Groenland et 2 pour l’Islande et Canada ; 17 pour l’Afrique ; 23 pour l’Asie ; et 33 pour l’Amérique ; 80 de ces 131 cartes sont sur double-page. Les sources cartographiques de Dudley sont variées et l’on sait qu’il utilisa les cartes de Henry Hudson, et échangea avec son beau-frère le navigateur Thomas Cavendish, le troisième à avoir fait le tour du monde en 1586-1588, pour la côte Pacifique de l’Amérique. Attentif aux découvertes de son époque, savant multiforme, ingénieur et mathématicien, Dudley s’applique donc à restituer des cartes «modernes» et qu’il dessine toutes, pour la première fois, selon la projection formalisée par Gerardus Mercator en 1569, avec une échelle nettement plus importante que jusque-là [ce planisphère de référence permet aux marins de déterminer avec précision leur position car il conserve les angles]. De plus, les relevés détaillés des côtes sont complétés, de manière innovante, par les indications des vents dominants, des courants et des déviations magnétiques. Majestueuse et rare deuxième édition Ce long travail ayant commencé vers 1631 pour Dudley et sans doute 1634 pour Lucini, la première édition peut enfin paraître en 1646-1647, en 4 volumes de formats variés, obligeant à plier la plupart des planches gravées ; l’atlas parut en 1648, avec retard car il fallut regraver les cartes d’un trop petit format pour une bonne utilisation. Elle est suivie, douze années après la mort de Robert Dudley, de cette deuxième édition, en 1661, composée par Lucini lui-même. L’artiste reprit les planches et cartes de la première édition, mais il facilita la manipulation de ce traité grâce à une homogénéisation de l’ensemble, en deux volumes monumentaux d’un même format, et réorganisa le contenu pour le rendre plus clair : les textes explicatifs de chaque livre sont suivis des illustrations (et non plus en partie imprimés au verso) ; les gravures, désormais numérotées, sont pleinement visibles (et non plus pliées) ; Lucini réalisa également 3 nouvelles gravures (I, la n°13 ; II, la n° 7 ; V, la n°12 qui est double). L’encyclopédie marine : un travail monumental et totalement original L’Arcano del Mare est divisé en 6 livres : les 5 premiers livres, composant le premier volume de cette deuxième édition, exposent l’expertise mathématique ainsi que le génie et les compétences en matière de navigation de Sir Dudley. Le premier livre traite de la longitude, le deuxième des erreurs dans les cartes marines existantes (avec 15 cartes et instruments gravés), le troisième de la marine militaire, détaillant les tactiques navales, le quatrième expose l’architecture et la construction de vaisseaux, le cinquième livre est consacré à la navigation astronomique, calculée selon le positionnement par rapport au soleil et aux étoiles ; Dudley décrit le «Great circle sailing», méthode de navigation qu’il adopta en 1620 [le navire se déplace le long d’un grand cercle, ce qui permet de suivre la distance la plus courte entre deux points sur le globe]. L’illustration est abondante et complexe : le titre du premier volume est illustré d’une gravure d’instrument de mesure du flux et reflux (qu’on ne retrouve pas dans le livre), le titre du second volume est illustré de la figure de la Petite Ourse (reprise du Livre V, 59), la lettre patente gravée sur double page (vol. I), 15 cartes composant la section «Portulan» du livre II (dont une carte de l’Amérique centrale et du Pérou, qui montre, dans un encart, la côte californienne pour la première fois), et pour les livres I à V, 217 gravures sur 146 feuillets, dont de nombreuses figures avec volvelles (pièces mobiles) : diagrammes circulaires, la plupart mobiles et superposés [avec graduations et échelles différentes, signes du zodiaque… ], souvent agrémentés d’une alidade (règle mobile qui tourne sur le centre du disque pour prendre la mesure des angles), mais aussi horloges à mercure, jauges, boussoles, compas, astrolabes, globes, divers instruments de navigations et tableaux pour calculer la position, l’ascension ou la déclinaison du soleil, les mouvements de la lune (par exemple, la pl. 26 du Livre I est décrite par Wardington comme représentant le premier instrument pour une éclipse, p. 321)…, les longitudes et latitudes, méridiens et parallèles, réfraction du soleil, des étoiles…, planisphères, méridiens, globes, constellations, arcs… ; plans de batailles navales, coupes de vaisseaux, constructions de navires. La quantité et la qualité de ces gravures hissent cet ensemble à un sommet d’excellence sans pareil.

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