90 87. regnaud de saint-jean-d'angély(Michel-Louis-Étienne). Ensemble de 3 lettres. États-Unis, 1815-1816. 400 / 500 € « Dans ce païs si riche, si fécond, si populeux, on vit pour vivre& pour gagner... » La société est nulle & sans ressource – les arts, tous les arts inconnus... » — Lettre autographe signée de son paraphe à Marie-Barbe de La Tour. newyorK, « le 1er Xbre » [1815]. « Oh, que vous auriés été coupable de ne pas m'écrire, que vous m'auriez chagriné... Quel baume de consolation votre tendresse & jusqu'à votre chagrin, vos larmes, ont versé sur mon pauvre cœur. Oh, vous êtes un des élémens de mon existence avec votre pauvre fille que je suis heureux dans ma misère de savoir près de vous, & confiée à votre affection... Ma pauvre amie, je ne vois pas encore se soulever aucune partie du voile qui me cache l'avenir & l'accroissement ou la diminution de nos malheurs. J'AI TOUJOURS, VOUS LE SAVÉS, REGARDÉ COMME LE PLUS GRAND MALHEUR CELUI D'ÊTRE LOIN DE SA PATRIE, condamné à vivre, à mourir, sur une terre étrangère. Si je pouvois vivre avec 6000 en un coin de la France avec vous, elle & quelques-uns de ceux que j'aime, je serois sur le champ résigné, & même joyeux. Quelques lettres... par exemple d'Hottinguer, laissent croire que le retour est possible – moi je vois des obstacles contraires sans nombre, mais je ne vois pas encore d'impossibilité – et en voyant quelle existence le païs peut offrir, je désire plus ardemment qu'elle ne s'établisse pas – on est libre ici, on est sûr du repos, c'est une chose incontestable – mais d'abord, JE CROIS LE PAÏS MENACÉ D'UNE NOUVELLE GUERRE PAR L'ANGLETERRE, & en ce cas la sûreté n'est nulle part, en ce sens que quoiqu'en disent tous les partis, une invasion est une chose facile dans l'État actuel de l'Angleterre à une armée dont elle ne sait que faire, & où les côtes sont ouvertes de toutes parts, surtout si, comme on l'assure, les Anglois vont du consentement de l'Espagne occuper les Florides. Ensuite, ma chère amie, DANS CE PAÏS SI RICHE, SI FÉCOND, SI POPULEUX, ONVIT POURViVre & POUR gagner– & par vivreje n'entens pas ce qu'on entend chés nous, mais le vivre plus près de celui des sauvages que de la civilisation. La société est nulle & sans ressource – les arts, tous les arts inconnus – les commodités de la vie traitées de luxe bien qu'elles puissent être sans dépense, et un luxe incommode & déplaisant commandé par l'usage en d'autres parties. IL FAUDROIT, POUR ÊTRE BIEN, RÉUNIR 8 OU 10 FAMILLES, ET SE CRÉER UN VILLAGE VERS LA PATRIE MÉRIDIONALE, VERS LE TENNESSEE OU LE KENTUCKI, DANS LA PARTIE LA PLUS VOISINE DES FLORIDES & DES CAROLINES, un Mr Le Rey de Chaumont [le financier franco-américain James Le Ray de Chaumont] dont j'ai vu le fils qui a été parfait pour moi, possède vers le lac Ontario 100 m[ille] arpens de terre ; plus loin encore, M. Parish a sur le S[ain]t-Laurent vis-à-vis Kingston & non loin de Montréal, 150 m[ille], des villes naissantes, des usines, & une popul[ati]on qui se décuplera en 10 ans – mais c'est un païs glacé pendant 6 mois. Ma pauvre Laure y mourroit. Les journaux annoncent que la Suisse, les Païs-Bas nous sont interdits, d'autres disent que Merlin [Philippe-Antoine Merlin de Douai] est à Bruxelles. Éclaircissés donc cela par M. Humbolt [le naturaliste Alexander von Humboldt]... » (3 pp. 1/3 in-4, quelques taches marginales). Sur Barbe-Marie Hutot de La Tour, voir ci-dessus le n° 85. 87
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