En passant dans les mains de petits censitaires, ces propriétés seraient mieux cultivées puisqu’il faudrait que ces propriétaires trouvassent leur existence et celle de leurs familles sur le produit de ces terres le cens payé. Or c’est une maxime incontestée en l’économie politique qu’en augmentant la production du sol, on augmente non seulement le Bien être privé mais la richesse publique. Une nation n’est réellement riche et forte qu’autant que la propriété est équitablement et universellement répartie. Comparez la force morale et matérielle de la France de 1860 riche de ses cinq millions de propriétaires avec la force morale et matérielle de la France de 1760 comptant seulement de 30 à 40000 propriétaires. L’agglomération de la propriété chez un petit nombre d’individus constitue la fortune et la richesse d’une fraction de la population seulement mais elle constitue en même temps la misère des masses c’est-à-dire fait une nation pauvre. […] Nous venons donc vous dire au nom des masses qui depuis quatre cents ans souffrent de l’oppression, du froid, de la faim, vous venons vous dire examinez, pesez, discutez cette importante question de la division de la terre et une éternelle reconnaissance s’attachera au nom du roi qui l’aura provoquée, des ministres qui l’auront opérée. Il ne s’agit pas de venir vous dire comme […] l’agitateur Prud’hon la propriété c’est le vol. […] Donnez à ceux qui n’ont pas sans dépouiller ceux qui ont. Il en sortira la plus grande, la plus morale, la plus populaire, la plus publique, la plus sociale, la plus pacifique révolution des temps modernes. LA RÉVOLUTION DU SOL. 6 – Réponse de Dumas à… Dumas Le dernier article est une lettre que Dumas adresse au journal L’Indipendente, suite à la publication de ses articles sur le brigandage. Je ne sais si vous pouvez vous douter à Naples, du bruit que font dans nos provinces vos articles intitulés des origines du brigandage – des causes de sa persistance et des moyens de le faire cesser. C’est avec une avidité fébrile qu’ils sont lus à la fois par l’aristocratie et par le peuple […] Puisse votre voix être entendue à Turin c’est le vœu de tout ce qui désire ici l’amélioration de la classe pauvre, le bien être du laboureur, du métayer, du colon. Trois ou quatre siècles de misère et de souffrances nous paraissent une dette suffisante payée à la fatalité. Vous, monsieur, vous venez d’ouvrir la porte au terme moyen et depuis huit jours, le peuple comprend qu’il n’est pas besoin de ruiner les riches pour enrichir les pauvres, et que Dieu a fait la terre assez grande pour que le plus petit sur un terrain à lui appartenant ait son humble place au soleil. À l’appui de la nécessité de cette loi sur l’insaisissabilité des terres, Dumas narre une anecdote dont il garantit l’authenticité. Elle se situe en 1858 en Calabre : le roi Ferdinand autorisa le partage des vastes propriétés du village de Strongoli. Dans le village se trouvait une riche famille : En moins de deux mois la famille… avait imposé par un moyen ou par un autre aux malheureux habitants de Strongoli l’obligation de leur vendre leurs lots au prix… on dirait que la main qui vous raconte cette triste histoire se refuse à vous dire à quel prix – au prix de DEUX PIASTRES le lot […] En moins de deux mois cette infortunée communauté était plus pauvre qu’auparavant. […] Ces faits parlent trop haut par eux-mêmes pour que j’ajoute aucun commentaire. […] Nous avons reproduit cette lettre sans y faire d’autres changements que de supprimer les noms propres. Importants articles partiellement édités en français (le dernier semble être resté complètement inédit) qui montrent la forte implication de Dumas dans la politique italienne et le sort des classes défavorisées de l’Italie méridionale. 3 000 - 4 000 € ★ 211 Alexandre DUMAS. Côté des hommes et Côté des femmes Manuscrit autographe signé A.D. 7 pp. in-4, sur papier vergé bleu Chronique comique sur les bandits napolitains des deux sexes Ce texte appartient à une série d’articles qu’Alexandre Dumas rédigea pour l’Indipendente (9 août 1862) et qui fut repris, en français, dans le Monte-Cristo du 7 octobre 1862. Dumas décide de diviser sa chronique comme on divise les bains, en côté des hommes et côté des femmes. Quoiqu’il soit peu galant de commencer par les hommes, comme il est entendu que le sexe masculin est le sexe noble, nous commençons par lui. Les anecdotes qu’il raconte appartiennent plus au genre de la mésaventure qu’à celle du style macabre : Deux matelots anglais qui s’étaient endormis ivres et habillés, avant-hier, se sont réveillés hier dégrisés et complètement nus. Quand nous disons complètement nus c’est dans toute l’acception du mot. La chose s’est passée naturellement sur la voie publique. Si la chose n’arrivait qu’aux Anglais on pourrait dire que de tels incidents sont des représailles, les Anglais outre Malte ayant pris pas mal de choses à l’ex Royaume des Deux-Siciles, mais malheureusement les voleurs napolitains ne respectent pas leurs compatriotes. Avant-hier a été pris en flagrant délit […] le nommé Salvatore Petrusino qui tirait le plus doucement possible les souliers des pieds d’un lazzarone endormi. Pourquoi un lazzarone a-t-il des souliers me direz-vous. N’ayant pas de réponse plus spécieuse à vous faire, je vous répondrai : pourquoi les lui prendre. Le résultat est que Salvatore Petrusino a pris les souliers et que les gardes de sûreté ont pris Salvatore Petrusino. Les femmes ne sont pas en reste : Deux femmes, Teresa Capuano et Mariana Sarno commencèrent avant-hier par se disputer, puis se prirent aux cheveux, puis recoururent aux pierres. Toutes deux sont grièvement blessées. Même dans les monastères la paix n’existe pas : Avant-hier dans la maison religieuse de Ste Marie Madeleine di Cristallieri une rixe a eu lieu entre les recluses et une certaine Maria Ricciardi. On a emporté celle-ci gravement blessée d’un coup de couteau. Avant-hier après-midi ce n’était pas une rixe, pas un combat, mais une bataille qui avait lieu à Monte Calvario un des quartiers où les femmes de Naples ont les plus chaudes têtes. Par motif de jalousie les deux sœurs Carolina et Carmela Mauvino défiaient deux autres sœurs […] Après les défis et les injures usités en pareil cas, on en vint aux mains et de la comédie on passa à la tragédie. La bataille avait lieu à l’arme blanche mais tout à coup on entendit un coup de feu dans les rangs. La détonation mit fin au combat. Dumas inventeur, avant Fénéon, des « nouvelles en trois lignes ». 600 - 800 € 210 210 211
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