AGUTTES NEUILLY. LETTRES & MANUSCRITS AUTOGRAPHES – LIVRES ANCIENS et MODERNES

37 36 Lettres & Manuscrits autographes • 15 mai 2024 Alors je ne suis pas prête et je rogne »… À son retour « on ira manger de l’andouillette et du gras-double. […] on va bavarder utilement, car je repars pour des conférences qui m’assurent une indispensable matérielle ». Bertrand, qui fête ses vingt ans « ça ne nous rajeunit pas ! », a la grippe… – [3 novembre]. Elle arrive à Paris avant de repartir pour 8 jours de conférences : « Si tu as dans l’esprit des choses sensationnelles et péremptoires à me donner sur le théâtre, pour ma conférence qui n’est même pas finie, garde-les moi précieusement. […] on joue La Vagabonde au “Quirinale” à Rome »… [Octobre 1933]. Revoir Léo la consolera d’être rentrée. « Colettema-fille trépigne, et n’attend qu’un signe de toi, qui lui as mis tous les espoirs au cœur »… – Léo s’est blessé et elle le conjure de ne pas courir « vers une liberté trop prompte », se souvenant d’une chute à Saint-Tropez alors que son pied était encore trop peu solide, et du désespoir qui l’avait suivie. Maurice et elles sont navrés pour lui… – La Treille Muscate. Elle regrette d’être partie sans le voir ; elle est trop fatiguée, à cause de son travail prolongé qui « n’est plus en rapport avec l’âge, ni avec rien. […] Je ne serai en repos que si tu m’écris un mot comme tu sais le faire, plein d’insultes et d’amitié »… On joint 9 L.A.S. à divers : – à Marguerite MORENO, « Ma chère âme ». La Bergerie, Beauvallon-Guerrevieille par Ste-Maxime [5 août 1925 ?] (4 p. in 4). Elle est si bien ici, avec son nouvel amant Maurice Goudeket, qu’elle se le reproche presque : « J’ignorais tout de ce pays. Aussi à l’aise que si je fusse salamandre, j’évolue parmi les flammes, ce brasier craquant des bois de pins, ces résines qui coulent, ces dalles qui brûlent le pied nu. […] Le bain, le sable, tout m’est élément natal, et l’amour aussi. Ne suis-je pas une abominable créature ? […] On se sent toujours un peu coupable, d’écrire auprès d’un être endormi, même quand c’est pour avouer […] qu’il est charmant, et qu’on l’aime. N’est-ce pas cet hiver que tu m’as avertie que je connaitrais, pendant un voyage, un homme qui “changerait ma vie” ? »… Ils reçoivent un peu dans ce « campement chic », car « Tout Paris-cabot est à Ste-Maxime » : Jules Berry « devenu athlète », Jane Marken « ronde comme un cavaillon », Marcel Simon, la danseuse Lysiana et sa petite copine, les Sacha Guitry… – 5 L.A.S. à Philippe HÉRIAT, [vers 1935-1950] (8 p. formats divers, plus une au même par Maurice Goudeket). Félicitations pour ses livres : Russie blanche et Russie rouge, Les Boussardel : elle se réjouit qu’on l’appelle balzacien, et regrette d’avoir perdu l’épingle de cravate de Balzac qu’elle aurait voulu lui donner, « une double coraline, et un petit serpent d’or autour » (elle dessine l’épingle) ; remerciements pour un envoi de soles : « J’adore les soles, et notre quartier manque de poissons. Sitôt reçues, sitôt mangées. Elles étaient d’une fraicheur émouvante »… ; au sujet du Goncourt. En juillet 1944, Maurice Goudeket souhaiterait acquérir les beaux exemplaires de Balzac qu’Hériat lui avait jadis proposés : « N’oubliez pas que j’ai de fort beaux Colette en grands papiers et illustrés. Mettez-les dans le plateau qui pourrait faire incliner la balance à mon avantage »… – à E. de LA GANDARA, [15.VI.1936] (1 p. in-4, enveloppe) : « Vous m’avez sauvé la vie (je suis du midi par mon père). Les fraises surtout sont merveilleuses, car elles gardent le goût du fruit frais. Vous êtes un amour »… – à Claude CHAUVIÈRE (2 p. in-4) : « Monstre de cynisme et d’insouciance […] j’ai travaillé, j’ai fini La femme de province », et ils sont allés 4 fois au Mesnil… – à Henri DUVERNOIS (2 p. in-8) : « Elle a une bronchite, la grande vedette. Mais elle s’habille exclusivement en farine de moutarde, se plante une ampoule d’évaturine dans la f…lanc droit, et elle compte jouer demain. Après tout, elle n’y risque pas une carrière, à moins que Duvernois, des fois, lui écrive un rôle !!! »… Plus une carte postale a.s. des Beautés Parisiennes représentant Colette Willy allongée sur une peau de lion et recouverte d’une peau de léopard, avec ses vœux au dos pour 1910; et un menu signé pour Colette par Paul Valéry, André Maurois, Jean Giraudoux, François Mauriac, Daniel Halévy, Georges Duhamel, etc. 1 500 - 2 000 € 209 COLETTE (1873 - 1954). TAPUSCRIT signé « Colette » avec corrections autographes, Colette parle à l’Amérique, 10 février 1940 ; 5 pages et demie in-4, cachet de la censure Contrôle Radio Diffusion. Ce texte était destiné à « Radio-Mondial. Émission de la nuit du dimanche 11 février au lundi 12 février, 1h15 du matin »… : « Amis d’Amérique, vous à qui chaque jour, presque chaque heure du jour, apporte une telle quantité de journaux […] si épais qu’ils ont l’aire d’être vendus au poids, je vous envie, en ce moment, d’avoir à votre disposition cette luxueuse quantité de papier imprimé, et de papier illustré, et d’images, et les beaux tirages en couleurs que vous permet la perfection de vos machines ». En France, les restrictions nécessaires pour économiser le papier, subies volontiers, donnent une « sorte de fringale de nouvelles, une crampe d’estomac de documentation photographique. […] le reportage photographique nous console un peu de l’obligatoire discrétion du texte. Seul le cliché est capable d’apporter, aux gens de l’arrière, des portraits exacts de la guerre »… Colette expose sa vison de la guerre et explique l’importance du rôle des reporters et photographes qui rapportent les faits en images… Outre des corrections autographes portées par Colette, plusieurs autres sont d’une autre main. 100 - 120 € 210 ELUARD Paul (1895 - 1952). MANUSCRIT autographe signé « Paul Eluard », Paris 18 juillet 1932 ; 3 pages in-4 sur papier bleu. Manifeste politique, marquant le ralliement d’une partie du groupe surréaliste au communisme, à la révolution soviétique. Malgré les fléaux qu’elle engendre, il ne faut pas oublier que la guerre « a été et qu’elle doit être le régisseur tout puissant, l’accélérateur vigoureux de la lutte des classes et le facteur décisif de la Révolution prolétarienne, pour peu que de guerre impérialiste elle soit transformée en guerre civile » Les signataires appellent à une guerre contre l’impérialisme français, où le prolétariat s’inspirerait de l’exemple russe en 1917. Ils ne sont pas pacifistes : « Il n’est pas de paix possible en régime capitaliste » où on se prépare à la guerre, d’abord contre l’U.R.S.S. : « Agressée ou non, l’U.R.S.S., seule nation qui puisse parler de la paix sans hypocrisie, peut être amenée d’un jour à l’autre, à faire la guerre pour défendre les conquêtes socialistes ». Et ils seront aux côtés de l’Armée rouge. À la veille de l’ouverture du Congrès de tous les Partis contre la guerre, ils s’élèvent contre Henri Barbusse et Romain Rolland qui condamnent la guerre ; et contre les socialistes « Vandervelde, Adler, Renaudel, Breitscheid et consorts qui ont si honteusement trahi le prolétariat en 1914 et qui, depuis, se sont acharnés à vouloir sauver la capitalisme, à briser la lutte des classes et les révolutions. Pas d’Union sacrée du prolétariat révolutionnaire avec les chefs traîtres de l’Internationale socialiste et le Fédération syndicale d’Amsterdam. […]. Un front unique ne pourra être réalisé que lorsque auront été démasqués » tous ces imposteurs. Ils veulent faire entendre leurs idées à Genève, mais les partis communistes ne sont pas suffisamment organisés. C’est pourquoi ils font appel à « l’Internationale des Écrivains Révolutionnaires pour être mandatés à ce congrès par sa section française où nous comprenons mal que nous ne puissions figurer au même titre que “les sept surréalistes (?) qui, dit notre camarade VaillantCouturier, sont déjà accueillis dans la section littéraire” et, à plus forte raison, que “l’idéaliste attiré par la puissance du rayonnement du marxisme (!!) qui figure dans la section philosophique”. Vive la lutte révolutionnaire du prolétariat contre la guerre impérialiste ! Vive l’alliance de la Révolution russe victorieuse et des ouvriers français contre l’impérialisme occidental ! » Suivent les noms des signataires : à côté d’Eluard lui-même, André Breton, Roger Caillois, René Char, René Crevel, JulesMichel Monnerot, Benjamin Péret, Guy Rosey, Yves Tanguy, André Thirion, Pierre Yoyotte. 500 - 700 € 208 209 210

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