102 187. Georges GILLES DE LA TOURETTE (1857-1904) médecin neurologue. L.A.S., Paris 29 décembre 1897, à un ami ; 1 page in-8 à en-tête Exposition Universelle de 1900. Service médical. 150 / 200 € « Si vous ne pouvez accepter le remplacement Critzmann [le médecin Daniel Critzmann (1863-1928)] passez le à monsieur Laborde (70 r. Condorcet) qui sera enchanté. Surtout restez avec nous, la première place fixe sera pour vous »… 188. Jacques LACAN (1901-1981). Manuscrit autographe, Ποιησις Poésie Psychiatrie, [vers 1958] ; 18 pages in-4. 4 000 / 5 000 € Brouillon, avec ratures et corrections, d’une passionnante réflexion sur la poésie, qui semble inédite, mais dont on retrouve quelques éléments dans le séminaire Le désir et son interprétation (1958-1959). Nous n’en donnons ici que quelques extraits. « On fait du malade mental avec du langage. On le classe. […] Pour confondre une activité éminente et un champ d’effondrement – la poésie et la psychiatrie – il faut partir d’un certain acquis historique il y a apparemment une tradition qui remonte loin […] L’idée du délire inspiré en fait le dénominateur commun. […] Nul désordre n’est en lui-même créateur. […] Les poètes maudissent. […] La poésie, la création. La psychiatrie, la production de m. [maladies] psychopathologiques. […] Il est ridicule d’attribuer à “Hamlet” protagoniste de Hamlet un complexe d’Œdipe. L’auteur en a-t-il un ? C’est selon. Peut-on avoir un complexe d’Œdipe avant qu’il ait été découvert par Freud. Ce n’est pas une question “idéaliste”. Il y avait du plutonium avant qu’on le découvre. […] Il est clair qu’on n’enregistrait pas d’irradiation radioactive avant qu’il y ait des appareils de Geiger. Il y a les effets réels de complexe d’Œdipe qui ne sont comptables comme tels que dans les conditions de la psychanalyse. […] La poésie fait le poète – elle le fait – il est fait. Certainement pas. Le fait de faire la poésie. Un charpentier fait un navire. Cela est être poète. That is to be poet. […] Pour ce qui est de la poésie, nous partirons du fait que les Grecs dans la Ποιησις reconnaissaient la création à quoi ils se sentaient propres, sans la privilégier au regard de tout ce qu’il peut y avoir, Ποιουμενα, de choses faites par l’opération du langage. Ils ne semblent pas avoir été plus anxieux qu’il ne convient de préciser pourquoi de ces choses faites, la plus haute à révéler le pouvoir du langage était celle où le langage était l’objet du premier soin. […] Mais ici il faut se souvenir que les philosophes dont la prise n’a déchu que du coin qu’y a enté Socrate, s’exprimaient en poèmes. Qu’on juge de ce qui en subsiste au grand fragment de Parménide. Le coin de Socrate, ce qu’il sait, n’est rien d’autre que son désir, il proclame lui-même ne rien savoir d’autre, et ce désir est aliéné puisque ce sont ses voix (ou son démon comme on voudra) qui le commandent. […] Contrant la poésie que ne quitte pas la pensée du destin (voyez Hésiode), c’est une issue psychiatrique qui a inspiré le détour d’où nous nous retrouvons interroger la poésie prise à revers par notre science. On a traduit cette incidence psychiatrique plutôt devinée que lue par un recours à l’idée sotte de décadence. Freud lui-même a cédé à cette fatalité à vouloir distancier d’Œdipe le drame d’Hamlet, qu’il décrit comme “pli refoulé”. C’est un faux pas. […] Car il ne faut pas s’égarer à l’image du poète maudit. Les poètes maudissent, ce n’est pas nouveau. Voyez Dante »… Etc. Et il conclut : « C’est ainsi qu’on ne se collète pas au cas d’Hölderlin sans en demeurer, quand on le rate, un fruit sec, – même à l’angoisse près d’y avoir démontré qu’on l’était déjà. Et la chère Ella Sharpe dont un seul cas de rêve interprété par elle, nous a occupé plus de deux mois, elle que soulevait un génie tant qu’elle s’est nourrie de Shakespeare, nous semble avoir dépéri simplement d’avoir voulu réduire l’œuvre qui l’inspirait au phasage alternant d’une cyclothymie. »
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