ADER Nordmann. Paris. COLLECTION BRIGITTE ET ROLAND BROCA.

453 350 son enfance débile et sa jeunesse fragile. C’est en 1920, « à partir du moment où j’ai été accueilli avec enthousiasme par le groupe des écrivains de la N.R.F., Jacques Rivière, André Gide, Roger Martin du Gard, Marcel Proust, Jean Schlumberger, que, délivré de l’angoisse de nourrir une vocation peut-être présomptueuse, confiant dans mon talent, soutenu par un certain nombre de lecteurs, je me suis épanoui physiquement. [...] Parti de rien, fils de boucher, originaire du département le plus modeste de France, je n’étais prédisposé en quoi que ce soit au destin qui fut – comme par surprise ou à force d’obstination – le mien. D’autre part, je ne me suis jamais donné comme écrivain. Je me suis toujours voulu professeur. L’enseignement de la jeunesse a été ma vocation la plus certaine. Décrire ne m’a jamais paru un métier. J’écrivais comme un fonctionnaire fait de l’alpinisme pendant ses vacances ou consacre ses veillées à l’astrologie. Pendant trente sept ans j’ai enseigné le français et le latin au Pensionnat de Passy ». Jouhandeau examine alors son œuvre : « si j’ai le plus grand souci de l’expression, du style et si ma passion est la connaissance de l’être humain, c’est sans littérature, sans concession à la littérature [...] Je passe volontiers pour moraliste avec cette nuance que si je préconise autant que possible la recherche du sublime, c’est en attachant plus d’importance à l’élégance du cœur, au moral qu’à une morale ou à un conformisme quelconque. [...] La marque propre de mon tempérament et de mon caractère est l’optimisme, un optimisme irréductible et inconditionnel qui se fonde sur un pacte d’amour entre l’Éternel et l’Homme »... .../... 453. Valery LARBAUD (1881-1957). Manuscrit autographe, Instruments de travail. I. Les balances ; 6 pages et quart, sur 4 feuillets petit in-4 (22 x 17 cm), interfoliés de feuillets avec texte imprimé collé en regard du manuscrit, le tout monté sur onglets en un volume relié demi-vélin ivoire, pièce de titre au dos. 3 000 / 4 000 € Très beau texte sur la traduction, destiné au livre Sous l’invocation de Saint Jérôme (1946). Manuscrit de travail sur feuillets d’un cahier de papier ligné, à l’encre noire, avec de nombreuses ratures et corrections, et des variantes, pour ce chapitre qui sera intitulé dans l’édition Les balances du traducteur. Les traducteurs sont des « peseurs de mots »... « Chacun de nous a près de soi, sur sa table ou son bureau, un jeu d’invisibles balances aux plateaux d’argent, au fléau d’or, à l’arbre de platine, à l’aiguille de diamant, capables de marquer des différences de fractions de milligramme. Auprès d’elles, les dictionnaires et les grammaires, visibles eux, et sans cesse en usage, ne sont que des instruments grossiers, simples entrepôts de matériaux en ordre [...] Mais l’essentiel est la balance où nous les pesons, car tout le travail de la traduction est une pesée de mots. Dans l’un des plateaux nous posons l’un après l’autre tous les mots de l’Auteur, et dans l’autre nous essayons tour à tour un nombre indéterminé de mots appartenant à la langue dans laquelle nous traduisons cet Auteur, et nous attendons que les deux plateaux soient de niveau ». Ce ne sont pas les mots du Dictionnaire, mais ceux d’un Auteur, « imprégnés et chargés de son esprit, presque imperceptiblement mais très profondément modifiés, quant à leur signification brute, par ses intentions et les démarches de sa pensée »… Ce mot est « vivant [...] des frémissements, des irisations le parcourent [...] ces signes de vie vont jusqu’à modifier rythmiquement son poids. Il nous faut donc saisir ce rythme afin que son contrepoids soit animé d’une vie semblables et d’un rythme vital équivalent. [...] Ainsi notre métier de traducteur est un commerce intime et constant avec la Vie »...

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