ADER Nordmann. Paris. COLLECTION BRIGITTE ET ROLAND BROCA.

252 326. Louis ARAGON (1897-1982). Manuscrit autographe signé, Note in vita di Madonna Elsa, [1960] ; 3 pages in-4, avec quelques ratures et corrections. 1 000 / 1 200 € Beau texte où Aragon parle de sa poésie et reconnaît la paternité de sa traduction des Cinq Sonnets de Pétrarque (1947, avec une eau-forte de Picasso). Ce texte a été publié en tête de l’anthologie de Poésies d’Aragon présentée par Jean Dutourd (Club du Meilleur Livre, 1960). « Les “Cinq sonnets de Pétrarque avec une eau-forte de Picasso et les explications du traducteur” ne portent d’autre référence que le nom d’un éditeur imaginaire à la Fontaine de Vaucluse, et d’une date mcmxlvii. C’est ici pour la première fois que ce livre est avoué mien, il n’a jamais figuré, jusqu’à présent, dans la liste de mes œuvres »... Le mythe de Pétrarque et de sa muse Laure a toujours eu pour Aragon une importance toute particulière, Laure devenant souvent une figure d’Elsa, à moins que ce ne soit l’inverse : « Je renverrai les curieux au Cantique à Elsa et à cette part de mon Henri Matisse, encore non publié […]. Aussi à ce poème par quoi se termine Le Roman inachevé (Prose du bonheur et d’Elsa) auquel je suis particulièrement attaché. […] Je voudrais dire ici que tout ce que je suis, tout ce que j’ai été, mon cœur, ma vie, mes rêves, s’inscrit en faux contre une conception de la poésie qui fait de l’art lyrique de l’amour une activité mineure. Cet art-là est pour moi le plus haut achèvement de l’homme, sa justification d’être »… Etc. Et il conclut : « Et s’il reste de moi quelque chose, ce sera, je le jure, pour avoir écrit tout ce que j’ai écrit in vita di Madonna Elsa ». 327. Louis ARAGON (1897-1982). Manuscrit autographe signé, Prendre son rêve où on le trouve, ou Les ennemis, [1962] ; 20 pages in-4, avec ratures et corrections. 1 000 / 1 500 € Long article sur le philosophe Nicolas Berdiaev (1874-1948), publié dans Les Lettres françaises (no 956) du 14 décembre 1962, à propos de l’ouvrage de Lucienne Julien-Cain, Berdiaev en Russie, précédé de La Russie est sortie des ombres (Gallimard, 1962). « On m’aurait dit, il y a quelques années, que j’aurais lu avec une sorte de passion un livre consacré au philosophe russe mystique que fut Nicolas Alexandrovitch Berdiaev, j’entends d’ici ce que j’aurais répondu. Ce qui prouve qu’on se connaît mal ». Le livre de Lucienne Julien-Cain a paru alors qu’Aragon achevait son Histoire parallèle après « trois années d’un travail ingrat et acharné. Peut-être est-ce ce que j’ai appris, l’écrivant, qui me rend autrement ouvert à certaines considérations si incompatibles qu’elles paraissent avec les idées qu’on me sait, pour ce que du moins elles se trouvent nécessairement à mes yeux s’inscrire dans un cadre dont je ne puis me détacher, cette Russie d’avant et d’après 1917, à la lumière de quoi le détail Berdiaev prend valeur différente, caractère de commentaire, devient élément de comparaison, joue le rôle de trébuchet »… Il faut lire ce livre « comme un roman philosophique : le roman d’un esprit et d’une époque »… Aragon retrace à grandes lignes la destinée de Berdiaev, avant de raconter ce qui arriva au philosophe pendant les premières années de la Révolution, et notamment avec Dzerjinski… Suit une réflexion sur le rétablissement des normes léninistes, y compris dans la vie culturelle soviétique… « Ne pas craindre la vérité, y trouver au contraire son orgueil, m’ont toujours paru les lettres de noblesse des écrivains qui se réclament de la transformation du monde par l’homme. Que soient aujourd’hui en train d’être battus, et cela ne sera peut-être pas si simple que tout ça, ceux qui prétendent encore nécessaires des interdits, lesquels ont surtout servi à masquer une dénaturation du socialisme, cela, je ne puis que l’accueillir comme un grand espoir, non seulement de littérature, mais de l’humanité. […] Je suis de ceux qui affirment le lien nécessaire entre la création artistique et la politique »…

RkJQdWJsaXNoZXIy NjUxNw==