ADER Nordmann. Paris. COLLECTION BRIGITTE ET ROLAND BROCA.

250 321. Louis ARAGON (1897-1982). Manuscrit autographe, signé en tête, Aragon vous parle: De l’Armée, [1960] ; 5 pages et demie in-4 avec ratures et corrections. 800 / 1 000 € À propos de la guerre d’Algérie et du film sur l’escadrille Normandie-Niemen (article paru dans le n° 750 de France Nouvelle, hebdomadaire du Parti communiste français). «C’est un grand malheur dans une nation quand le peuple se détache de son armée, quand l’armée n’est plus qu’un instrument du petit nombre contre le peuple, quand le nom de la patrie n’a plus le même sens pour ceux qui ont charge de la patrie et ceux qui en sont la chair et le sang ». Aragon retrace brièvement l’histoire de l’armée française depuis les guerres royales jusqu’à « l’épreuve de l’occupation et la résurrection de la Résistance ». Mais il est inquiet de voir, avec la guerre d’Algérie, « l’armée pervertie, aux mains des colonels, devenue un instrument contre la nation, et contre le pouvoir même qu’elle avait semblé d’abord appeler ». Aragon réfléchit à ce que doit être l’armée, à propos du film Normandie-Niémen « qui touche à la fois aux questions de la grandeur et de la servitude militaires, et à ce qui fonde une alliance à laquelle nous sommes nombreux en France pour croire que sans elle il n’y a ni sécurité de nos frontières, ni d’assurance pour la paix du monde ». Il s’insurge contre l’éloge de « l’obéissance sourde et aveugle dans l’armée », qui est une « attitude de vichyste » ; à Alger en janvier (semaine des barricades), « le patriotisme aurait certainement été la désobéissance [...]. L’intérêt national est dans l’amalgame de la nation et de larmée »... 322. Louis ARAGON (1897-1982). Manuscrit autographe, signé en tête, Aragon vous parle: d’un voyage en France, [1960] ; 6 pages in-4 avec ratures et corrections. 800 / 1 000 € Évocation de la France et de son histoire à propos du voyage de Khrouchtchev (mars 1960). Aragon parle de tout ce qu’il aurait aimé montrer à Khrouchtchev... « On ne connait pas un pays par ses seuls paysages, ni par le seul spectacle de son énergie industrielle par exemple. Surtout un pays comme le nôtre. La France est le résultat assez singulier, à cette pointe de l’Europe, de forces contradictoires, de luttes séculaires, de grands malheurs et de grands rêves. Elle offre sur un territoire limité plus de contrastes peut-être, plus de diversité qu’aucun autre pays au monde [...], le paysage change à chaque tournant de route ». Aragon projette ainsi d’abord quelques promenades dans Paris, le Paris de l’histoire et le Paris des peintres... Puis le pont du Gard, Avignon, la Normandie, Dijon, Reims, Bordeaux, Lyon, Roncevaux, Nice, Lille ; la France des maquisards... C’est l’image pleine d’histoire et d’émotions de cette France qu’Aragon voudrait donner à Khrouchtchev, « pour qu’ayant senti où bat le cœur profond de notre pays, ayant touché ses plaies [...], il s’en revienne parmi les siens avec le sentiment de ce qui est notre humanité, et la certitude qu’une telle nation, tant de fois déchirée, au sol tant de fois envahi, ne peut que désirer la paix, au delà de tous les marchandages, des jeux d’alliance, une paix faite pour tout l’avenir, la jeunesse, les amoureux et les chansons ».

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