ADER Nordmann. Paris. COLLECTION BRIGITTE ET ROLAND BROCA.

179 Louise, « pauvre chère Muse », a mal pris ce que Flaubert lui disait d’Alphonse Karr [que Louise avait poignardé] : «Me supposes-tu donc assez goujat pour te rappeler ces choses dans une intention blessante ? Non ! Si tu avais toujours eu pour conseillers des gens d’un sens pratique aussi bourgeois que moi, et que tu les eusses écoutés, il y a bien des choses qui t’arrivent et qui ne t’arriveraient pas ? […] On est toujours ridicule quand les rieurs sont contre vous. Voilà ce que j’entendais, et les rieurs sont toujours du côté des forts, de la mode, des idées reçues etc. – Pour vivre en paix, il ne faut se mettre ni du côté de ceux dont on rit, ni du côté de ceux qui rient. Restons à côté, – en dehors– mais pour cela il faut renoncer à l’action ». Et il cite Épictète et La Rochefoucauld… « En suivant ces idéeslà, on est ferme dans la Vie et dans l’art. Ne sens-tu pas que tout se dissout, maintenant, par le relâchement, par l’élément humide, par les larmes, par le bavardage, par le laitage. La littérature contemporaine est noyée dans les règles de femme. Il nous faut à tous prendre du fer pour nous faire passer les chloroses gothiques que Rousseau, Chateaubriand & Lamartine nous ont transmises. Le succès de Badinguet [Napoléon III] s’explique par là. Il s’est résumé celui-là. Il n’a pas perdu ses forces en petites actions divergentes de son but. Il a été comme un boulet de canon, pesant et roulé en boule. Puis il a éclaté tout d’un coup & l’on a tremblé. – Si le père H. [Hugo] l’eût imité il eût pu faire en poésie, ce que l’autre avait fait en politique, une chose des plus originales. Mais non, il s’est emporté en criailleries. La Passion nous perd tous »… Il lui rapportera les lettres de Hugo et celles de Musset, et renvoie le billet de Béranger et les vers de Vigny… «Tu m’as envoyé ce matin une très belle pensée: “ô humanité, que tu me dégoûtes !” Je vois que tu fais des progrès en philosophie. Je ne saurais que t’en applaudir »… Correspondance (Pléiade), t. II, p. 507.

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