ADER Nordmann. Paris. COLLECTION BRIGITTE ET ROLAND BROCA.

152 148. Donatien-Alphonse-François, marquis de SADE. L.A.S., [Paris] 22 mai 1791, à son avocat Gaspard Gaufridy ; 1 page in-4. 800 / 1 000 € Il apprend que sa tante, Mme de Villeneuve, « allant de Carpentras a Orange voir Md de Raousset sa fille, a eté arrettée par les brigands et menée en prison, je vous avoue que cette nouvelle a eté comme un coup de foudre hier pour moi quand je l’appris [...] a 80 ans cette malheureuse femme, voila en verite une horreur abominable et bien digne de ces brigands la; on ajoute que Md de Raousset a offert sur le champ une somme considerable pour la rançon de sa mère, ce trait est tout simple sans doute, mais il honore en meme temps son ame et je l’aime et l’estime bien plus depuis quelle a fait cela. [...] offrés lui [à Mme de Villeneuve] de ma part tous les services que nous pourrons lui rendre ; proposés lui la Coste, il me semble quelle y sera plus en sureté puisque cest en France »... Il recommande ensuite de lui envoyer au plus vite les 1030ll qui doivent lui revenir, « pour ne pas me trouver entre deux salles le cul a terre »... Correspondance (Lély), CCII. 149. Donatien-Alphonse-François, marquis de SADE. L.A.S., [Paris] 14 novembre 1791, à son avocat Gaspard Gaufridy ; 4 pages in-4 remplies d’une petite écriture serrée. 1 000 / 1 500 € Longue lettre sur ses affaires. Il remercie d’un envoi d’argent, et insiste sur le paiement des 3 330 livres du quartier de janvier : « vous savés combien les retards me derangent » ; il faut presser la vente d’une maison à Arles, malgré la démission de M. Lions (son régissuer) : « peste comme il s’enflamme ce monsieur, c’est un jacobin sans doute ? Nous en avons ici qui prennent feu comme cela, et qui m’amusent bien»… Puis il parle de la mort de sa cousine, Mme de Raousset, et s’inquiète de sa tante Mme de Villeneuve (dont il espère hériter) : « qu’elle se porte bien c’est tout ce que je lui demande, je lui suis fort attaché, et vous connaissés assés mon désinteressement pour être bien sur que sa succession ne me dedomagerait pas de sa perte. Il n’en faut pas moins avoir l’œil a tout ce qui passera sur cela […] la meillieure de toutes les façons à profiter de la succession de Md de Raousset passée à Md de Villeneuve estimée par Ripert cent mil francs à ce qu’il vient de me dire, la meillieure façon dis je d’en profiter est de lui emprunter beaucoup d’argent, de placer comme il faut cet argent, de lui payer les interets avec la vente dudit argent, et à sa mort, fonds et interet tout me rentre, je ne connois pas de meillieure et de plus sure façon que celle la pour tout avoir ». On pourrait lui emprunter 24 000 livres (pour acheter une maison à Paris) au lieu de vendre la maison d’Arles : « ce procédé seroit délicieux, dites lui que si je meurs avant elle, je lui laisserai la maison, pour mes enfans, n’en jouir qu’après elle, cela la décidera peut-être ». Il ne lui reste qu’une cousine, Julie de Villeneuve (religieuse) : « je connois Julie à merveille et l’ai toujours aimé de tout mon cœur ; dites lui mil et mil choses pour moi »… Puis il fait des recommandations pour l’envoi de divers objets (confitures, vin cuit, etc.) et d’une cassette, que Sade avait emballée lui-même : « il y a grande apparence que la demoiselle Rousset aidé des pieux conseils de la dame de Sade a tripoté dans tout cela »... Il s’irrite contre le « chevalier » de Mme de Raousset, « un certain Rivette de Bonnieux […] le personnage aurait bien pu se passer de manger l’argent de ma cousine coucher oui, mais gruger non ». On lui dit qu’il ne serait pas très politique d’envoyer son fils le chevalier à Carpentras ; il vaut mieux qu’il y aille lui-même, au mois de mai ; mais il s’inquiète pour sa maison de Paris : « Parce que si elle est a moi pour lors, elle me sera assés précieuse pour désirer qu’elle soit bien gardée, et si elle n’est pas a moi ce sera precisément l’époque ou il faudra que j’en décampe, et ça reculeroit alors mon voiyage de deux ou trois mois » ; il n’a aucune nouvelle de ses fils ; l’aîné est en Allemagne… « le roi vient de poser son veto sur le décret contre les émigrans, ce procédé de sa part fait ouvrir les yeux a tout Paris, car le voilà donc à présent acceptateur très décidé de la Constitution, s’il refuse un décret, il accepte tous les autres, cela est clair, et voilà bien des gens surpris, et principalement ceux qui s’efforçaient de le faire passer pour prisonier »... Il parle encore de l’argenterie de la succession de l’abbé de Sade, qui devrait lui revenir, du linge de La Coste, dont une grande partie a disparu, ainsi que des rideaux de Perse… « vous menés dites-vous des témoins avec vous quand vous allés au chateau, je vous avoue que je suis extremement scandalisé, et que vous preniés cette précaution et que vous me le disiés. Je vous demande avec la plus vive instance que pareille chose n’arrive plus, autrement vous me contraindriés a défendre tres energiquement à vos témoins de vous accompagner. […] Je ne dis pas que ce soit vous qui ayiés fait entrer au chateau tous ceux que je soupsone de m’avoir dérobé beaucoup de mes effets, j’ai dit simplement et je dis encor, voila ce que c’est, que de les y avoir laissé entrer. Vous ne pouvés ni me blamer, ni m’empecher d’avoir de cela le plus extrême regret. […] Assurément je savois la Rousset au chateau, mais je ne l’ai jamais cru despot, je l’ai toujours cru sous vos ordres, et toujours cru honête, je suis tres surpris quelle ne l’ait pas étée. Une autre chose qui me fache beaucoup encor, c’est (a moins que ce ne soit pour votre commodité) que vous ailliés coucher aillieurs qu’au chateau quand vous allés à la Coste, cela permettés moi de vous le dire est fort ridicule »... Etc. Il annonce enfin : « J’espère dans ma première lettre vous apprendre la fin de mes affaires avec Md de Sade ; souvenés-vous que je dis seulement j’espère »... Correspondance (Lély), CCIX.

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