ADER Nordmann. Paris. COLLECTION BRIGITTE ET ROLAND BROCA.

148 145. Donatien-Alphonse-François, marquis de SADE. L.A.S., [donjon de Vincennes] 2 septembre 1783, à la présidente de Montreuil ; 4 pages petit in-4. 1 500 / 2 000 € Violente lettre de reproches à sa belle-mère, disant son amour pour sa femme. « Je vous importune peu souvent, Madame, et vous devez croire que quand je le fais, il faut que j’aie un furieux besoin de m’adresser à vous, de tous les coups que vous m’avez porté depuis que je suis ici, aucun ne m’a été plus sensible que celui dont vous venez de dechirer mon cœur. Vous vous pretés Madame à ce qu’on me persuade que ma femme se deshonore – estil possible grand Dieu que ce soit une mere ou qui tolere de telles infamies ou qui travaille à les persuader à son gendre ! Votre politique est affreuse, mais elle se devine, Madame, vous desireriez que je me séparas de ma femme et qu’une fois hors d’ici je ne voulus plus la reprendre. – Que vous avez mal connu mes sentimens pour elle si vous avez pu croire que rien au monde put jamais produire un tel effet. Vous me la feriez voir un poignard à la main cherchant à me déchirer le cœur que je me précipiterois à ses pieds et que je lui dirais – Frappe je l’ai bien merité. Non madame, rien rien dans l’univers entier ne sera capable de m’éloigner d’elle, et je l’adorerai jusque dans sa vengeance. J’ai trop à reparer grand Dieu, j’ai trop à reparer, ne me faites pas mourir en desespéré sans pouvoir lui faire oublier tous mes torts. Amour, estime, tendresse, reconnaissance, respect, tous les sentimens que l’âme peut former se reunissent en moi pour elle, et cest au nom de tous – fautil vous l’avouer, madame plus encor au cri de ma conscience, que je vous conjure de me la rendre aucitot que je serai hors d’ici »… Qu’on le mette à l’épreuve… « Remettez nous ensembles, et sous tels yeux, et dans tel pays que vous voudrez. – Là qu’on m’observe depuis le matin jusqu’au soir, pendant autant d’années quil vous plaira, et à la plus legere faute ! – qu’on me l’enleve, que je ne la revoie jamais et qu’on me reprive une derniere fois de ma liberté et de ma vie si l’on veut, je consens à tout. […] Le ciel qui m’entend m’est temoin que si je la conserve, ce nest que pour tacher de reparer ma vie, que pour tacher de ramener l’ame vertueuse et sensible de votre adorable fille à laquelle dans l’affreux delire de mes egaremens, j’ai porté des coups si sensibles »… Que la présidente cesse de poursuivre sa vengeance, et écoute la prière de son gendre... Qu’on ne le fasse pas sortir de prison, si on refuse de le réunir à sa femme… « Je ne me verrai jamais libre un instant sans voler dans ses bras. Dussiez-vous l’engloutir dans les entrailles de la terre, j’irois l’en arracher et la rejoindre. Aucitot libre je vole chez M. Le Noir et lui redemande ma femme. Je cours au ministre s’il me la refuse, et repoussé de partout, je me jette aux pieds du roi, et lui redemande ce que le ciel m’a donné, et ce que les hommes ne peuvent pas me ravir»… Etc. Correspondance (Lély), CLXIV.

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